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Tracer des liens entre l’apprentissage et l’innovation en enseignement supérieur
Pourquoi tracer ces liens ?
Accueillir l’évolution universitaire
Le paysage de l’éducation universitaire a changé : population étudiante diversifiée et hétérogène, présence grandissante du numérique, massification des groupes, etc. (Bonin, 2018 ; Brook , 2016; Universities Canada, 2016). Dans ce contexte d’évolution rapide où les voies de communication se multiplient, le savoir devient accessible par différents moyens et le numérique occupe une position privilégiée dans cette diffusion.
Ce contexte exerce une pression grandissante pour que le personnel enseignant fasse une utilisation plus raisonnée du numérique. Pourtant, plusieurs d’entre eux hésitent encore à repenser leur enseignement, malgré le fait qu’ils aient à leur disposition des environnements numériques d’apprentissage (Bates, 2015 ; Stockless, 2018). Selon Poellhuber et Fournier-St-Laurent (2014), la très grande majorité du personnel enseignant qui a été engagé au cours de la dernière décennie n’a qu’une très faible expérience des technologies pouvant être utilisées en enseignement. Et, comme le souligne Endrizzi (2012), l’accent est davantage mis sur les aspects techniques et matériels plutôt que sur les aspects pédagogiques, même si on observe une tendance à utiliser l’efficacité des outils comme levier pour l’enseignement (Adam Baker, 2017).
La recherche portant sur le numérique et l’enseignement est bien active (Poellhuber & Fournier-St-Laurent, 2014) et elle est encouragée notamment pour le Conseil supérieur de l’éducation (2015). Cependant, il est encore trop tôt pour savoir si elle a un impact sur les processus cognitifs et sur la qualité de l’apprentissage, puisque peu d’études empiriques en font état et celles qui existent sont souvent contradictoires ou teintée de parti pris (Endrizzi, 2012 ; OECD, 2012). C’est dans une optique d’enrichir ce corpus d’écrits scientifiques que notre équipe souhaite s’attarder à l’apprentissage et à l’innovation en enseignement supérieur, et ce, afin de mieux comprendre les liens qui existent entre le personnel enseignant, les usagers pédagogiques du numérique et les apprenants.
Innover au-delà des connaissances techniques
L’innovation ne tient plus à la seule connaissance technique des outils ou à leur utilisation en classe, mais plutôt à des usages au service de l’apprentissage. Pour innover, il faut d’ores et déjà agir sur les représentations qu’a le personnel enseignant au sujet d’approches pédagogiques innovantes et du numérique. Par exemple, certaines recherches démontrent que le personnel enseignant associe le numérique à la formation à distance, ont des usages homogènes et limités qui ne sont pas fondamentalement différents de ceux des personnes étudiantes (Endrizzi, 2012 ; Allen & Seaman, 2001). Il éprouve aussi des difficultés à endosser une posture d’accompagnateur et à laisser plus de contrôle aux personnes étudiantes, souvent implicite lorsque le numérique est présent (Albero, 2011 ; Barbot & Massou, 2011). Cette résistance à intégrer le numérique à l’enseignement viendrait de la tradition universitaire dans laquelle les technologies heurtent les habitus.